Concert de Kassav' en Guadeloupe, après les festivités le scandale politique. Dossier complet.
Dernière mise à jour : 28 mars 2021
En 2019,la bande à Jacob Desvarieux et Jocelyne Béroard entamait une gigantesque tournée aux quatre coins du Monde. Dernière date de cette tournée planétaire, la Guadeloupe avec un concert organisé au stade de Baie-Mahault. Fin des festivités, voici venu le scandale. Selon la Chambre Régionale des Comptes dans son rapport, l'association Sign'Alizé chargée de l'organisation du concert aurait perçu 120 000e de subventions publiques. Un scandale politico-financier qui tombe mal pour l'exécutif local à quelques mois des élections régionales.

2019 a été l'année des quarante ans de la formation musicale Kassav' et créatrice du zouk, qui est à ce jour, le dernier grand courant musical créé et aujourd'hui écouté dans le monde. Pour leurs quarante ans, les membres du plus grand groupe de musique française originaire des Antilles-Françaises avaient entamé une tournée mondiale durant laquelle, Jacob, Jocelyne, George, Jean-Claude et Jean-Philippe avait joué en France, en Europe, mais aussi en Afrique, en Océanie, en Guyane dans plusieurs pays de la Caraïbe, à la Martinique et la plus importante des dates : la Guadeloupe où ils ont donné un concert grandiose devant plus de 10 000 personnes au stade de Baie-Mahault.
A présent que les festivités sont terminées, voici venue l'heure de régler les comptes. C'est la Chambre Régionale des Comptes, haute juridiction administrative chargée de surveiller et de vérifier les comptes des collectivités locales et de juger des éventuels conflits relatifs à ces comptes, qui a relevé plusieurs incohérences dans les comptes de l'association chargée d'organiser le concert. Une affaire qui a été révélée en fin de semaine dernière sur les réseaux de La 1ère avant de se répandre telle une traînée de poudre dans l'ensemble des médias locaux comme nationaux sans pour autant donné plus de détails à l'affaire Sign'Alizé. Même le Canard Enchaîné, hebdomadaire satirique qui a pignon sur rue dans l'Hexagone relate le scandale apparent.

Une affaire qui tombe bien mal pour l'exécutif car, approchent les élections régionales, bien que la date soit en débat vu la crise sanitaire qui perturbe depuis un an toute vie sociale et politique. Par ailleurs, le mis en cause dans cette sordide affaire est un proche de l'actuel président de Région, Ary Chalus qui selon les dires de la CRC travaillait à l'époque à la municipalité et désormais est employé à l'Hôtel de Région.
Plusieurs incohérence dans la gestion et les comptes de l'Association :
L'objet de cette association de type loi 1901, à but non lucratif, est la « Promotion de la Guadeloupe avec les outils multimédias : Cd-Rom, Cd extra, Internet, vidéos disques, ou tous procédés connus ou à découvrir. » Les subventions publiques octroyées en 2019 à l'association, d'un montant total de 120 000 €, justifient le contrôle opéré par la chambre régionale des comptes comme le prévoit l'article L. 211-8 du code des juridictions financières.
Concernant la Gouvernance de l'association, la Chambre Régionale des Comptes souligne que " Cette association apparaît réduite puisque, selon ses statuts, le conseil d'administration est composé de trois membres (un président, un trésorier et un secrétaire) qui constituent ses seuls adhérents. Elle se présente également comme une structure familiale puisque le président et le secrétaire sont frères. Tous deux sont membres fondateurs du groupe musical Kassav. "
En ce qui concerne les activités de l'association, on sait qu'elles sont orientées vers la musique guadeloupéenne et sa promotion internationale. Les réunions des instances (bureau et conseil d'administration) ne respectent pas les fréquences des statuts associatifs ni les comptes rendus à produire. Il en est de même pour les assemblées générales dont les rapports sont inégaux dans leur présentation.
Néanmoins c'est bien la situation financière de l'Association qui est dénoncée par la CRC. Celle-ci souligne que les rapports fournis lors des AG ( Assemblées Générales) sont peu fiables.
L'institution écrit : " L'absence de comptabilité pénalise l'association pour son suivi financier. Les mouvements financiers sont peu importants jusqu'en 2018 ; seules les années 2019 et 2020 enregistrent des ressources et des charges élevées en raison de l'organisation d'un concert en décembre 2019. Les dépenses et des recettes sont peu documentées et font peser des incertitudes sur l'usage des finances associatives. Le président décide seul de l'emploi des fonds associatifs et assure les fonctions de trésorier, ce qui ne facilitent pas l'exercice d'un contrôle des mouvements sur le compte bancaire associatif. Le niveau de la trésorerie associative en juillet 2020 affiche un solde de 860 € qui contraste avec le bénéfice dégagé par le concert Kassav du 14 décembre 2019. Il s'explique en partie par des paiements réalisés par l'association mais non justifiés, pour un total de 41 000 €."
Autre problème pointé dans le rapport de la haute instance évidemment celui de l'organisation du concert de Kassav' le 14 Décembre 2019. " Le concert était programmé dans le cadre de la manifestation « Jarry en fête » organisée par Cap Excellence. Le « directeur des opérations spéciales et manifestations à vocation économique » de cette collectivité, chargé du suivi de l'évènement, a commis de graves manquements.
Dans sa réponse aux observations provisoires, le président de l'association Sign’Alizé a
approuvé l’ensemble des observations de la chambre régionale des comptes et déclaré vouloir tout mettre en œuvre pour «concrétiser au plus tôt les six recommandations de la CRC».
Des dysfonctionnements à tout va : Que nous apprend le rapport ?
Sign'Alizé est une association de type Loi 1901 à but non lucratif créée par Pierre-Edouard Décimus qui n'est autre que le fondateur du groupe Kassav'. Elle a pour but, « la promotion de la Guadeloupe avec les outils multimédias.». Elle a été déclarée à la sous-préfecture de Pointe-à-Pitre le 10 Juin 1999. L’activité associative est résolument orientée vers la musique guadeloupéenne. Les trois derniers rapports d’ activité font état d’actions de l’association vers les établissements scolaires et les écoles de musique. L’activité d’ organisation de concert est ponctuelle; elle n’est pas spécifiquement prévue par les statuts mais est tolérée par la réglementation. Seuls trois personnes seraient membres de l'association dont le président est Pierre-Edouard Décimus. De ce fait, les ressources financières issues des cotisations sont donc nécessairement modestes, comme le précise le tableau des données de cotisations communiqué :

Pourtant la Chambre Régionale des Comptes dénonce des rapports financiers incomplets. Pour la période allant de 2016 à 2020 seuls deux rapports ont été présentés :
- Celui du 9 septembre 2017 pour les comptes de l'année 2017 mais sans le budget pour l'année 2018.
- celui du 21 août 2018 pour les comptes de l'année 2019 avec cette fois un budget prévisionnel pour 2019.
Sauf que le rapport dénonce une comptabilité complexe. Ainsi, pour l’exercice 2019, le rapport établi le 17 août 2020 indique : « La complexité de la comptabilité globale ne nous permet pas d’avoir une lisibilité suffisante dans ce contexte de présentation par téléphone. Le contrôle de la CRC de Guadeloupe obligeant à une grande précision, le Président demande un délai afin de fournir un rapport financier précis d’ici le 15 septembre. »
Le rapport annoncé pour le 15 septembre 2020 n’a pas été produit.
Malgré les recommandations maintes fois formulées, l'association n'a jamais été en contact avec un commissaire aux comptes comme le prévoit l'article 7 des statuts qui prévoit que que « l’assemblée générale désigne un commissaire aux comptes, professionnel agréé. » Une disposition qui n'aurait jamais été appliquée depuis la création de l'association soit depuis 1999. « Comme évoqué pour la première recommandation, cette exigence apparaît excessive, compte tenu des sommes manipulées par l’association. Seule l’ année 2019 mériterait l’intervention d’un professionnel du chiffre pour clarifier le bilan financier du concert de Kassav’. Une révision des statuts sur ce point serait opportune. »
Autre problème, des mouvements d'argent qui n'ont aucune justification, surtout pour la période de 2017 à 2018 où la CRC a constaté que les soldes pour cette période est « peu compréhensible puisque plus de 7 000 € sont ajoutés au déficit cumulé entre le rapport de 2017 et celui de 2018. »( voir le tableau ci-dessous)

Autre problème énuméré dans le rapport de la Chambre Régionale des Comptes, l'utilisation d'un compte administratif non documentée avec surtout l'usage d'une carte bancaire sans justificatif. Comme l'écrit les rapporteurs de la CRC : " Le président de l’association dispose d’une carte bancaire qui lui permet d’effectuer des paiements à partir du compte de l’association.
Sauf que " La majorité de ces retraits ne sont étayés par aucun justificatif et reposent sur les déclarations du président. Quelques paiements en espèces ont été déclarés pour des prestations réalisées pendant le concert Kassav' du 14 décembre 2019.
Plusieurs retraits dépassent 500 € (jusqu’à 2 000 €). L’absence de procédure et de justificatif pour l’usage de ce moyen de paiement par le président de l’association ne garantit pas une transparence suffisante des dépenses associatives."

Un concert fortement subventionné
Autre problème dénoncé dans le rapport ce sont les subventions allouées pour l'organisation du concert de Kassav' organisé au stade de Baie-Mahault. Un concert dont on sait qui a été fortement subventionné par le CTIG ( Comité du Tourisme des Îles de Guadeloupe ) et par Cap Excellence ( nom de la communauté d'agglomération réunissant Pointe-à-Pitre, Les Abymes et Baie-Mahault.) Dans le rapport on apprend que pour le CTIG :
Lors de sa séance du 21 novembre 2019 présidée par le président du CTIG, M. Ary Chalus, le conseil d’administration a approuvé à l’unanimité l’octroi d’une subvention de 100 000 €. Le président du CTIG a indiqué que la région Guadeloupe souhaitait que cette opération soit portée par le CTIG car cet événement constitue un produit touristique, d’autant plus que ce concert entre dans le cadre de la croisière « Kassav' Love and Ka dance ». Durant une semaine, le groupe fera découvrir ce patrimoine musical des îles de Guadeloupe à travers la Caraïbes. De même, le partenariat portant sur cette opération était considéré comme avantageux pour le CITG qui pourrait utiliser Kassav' comme instrument touristique. "
Evidemment des contreparties subsistaient avec en l'occurrence :
- la production d’un livre témoignage « Kassav’ Love and Ka dance »pour janvier 2020 ;
- des actions de communications et couverture médiatique ;
- une composition musicale « Ça, c’est la Guadeloupe »,
- l’association du CTIG à la croisière « Kassav' Love and Ka’Dance »du 7 au
14 décembre 2019 et enfin le concert du 14 décembre au stade de Baie-Mahault.
Des contreparties qui ont été honorées par les membres du groupe puisque, la composition musicale a été produite et utilisée par le Comité du Tourisme pour la conception et le déploiement des outils audio visuels qui ont été employés dans le cadre d'une campagne régionale et locale entre les mois de Juin à la fin du mois d'Août 2020 et intitulée " Le bonheur à moins d’une heureʺ. De plus, il y a eu un livrable extrait du livre témoignage de Pierre-Edouard DECIMUS, intitulé : KASSAV’Love and Ka Dance et sous-titré ʺLa prière des oiseaux pour Entrevoir l’écho des Silencesʺ produit au CTIG le 21 août 2020. Le CTIG a de ce fait émis une facture de 100 000€. A ce jour seul 50 000€ ont été versé à l'association. Un second versement de 50 000€ est en attente.
Du côté de Cap Excellence, le rapport informe que dans une convention datée du 8 Octobre 2019, un contrat de parrainage est conclu entre la collectivité et l'association avec un versement d'une hauteur de 20 000€ avec pour obligation la présence du logo de CAP EXCELLENCE sur l'ensemble des moyens de communication de la manifestation ainsi que l'octroi de 44 Places ( standard à VIP) pour le concert pour un montant de 2480€. A prendre en compte également les frais de repas d'affaires ou de mission enregistrés dans la comptabilisation des deux mandats de la collectivité qui ont permis le paiement de la subvention ont été inscrits sur le compte 6238 intitulé « Divers », mais comme le précise le rapport, la subvention, telle que qualifiée par la communauté d'agglomération CAP Excellence, aurait dû être imputée sur le compte n°6574 dénommé : « Subventions de fonctionnement aux associations et autres personnes de droit privé ».
Le rapport de la Chambre Régionale évoque des manquements au niveau du compte rendu financier du concert qui serait erroné et incomplet et bien éloigné de la législation en vigueur notamment celui du CTIG. Un manquement à l’arrêté du 11 octobre 2006 relatif au compte rendu financier prévu par l'article 10 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. A ce sujet la CRC écrit : " il ( compte rendu) ne présente, notamment, ni les contributions volontaires en nature telles que le stade ou les agents de la ville de Baie-Mahault mis à disposition, ni la seconde annexe comprenant une information qualitative décrivant, notamment, la nature des actions entreprises et les résultats obtenus par rapport aux objectifs initiaux du projet.

Toujours selon la CRC, les justificatifs produits au CTIG sont incomplets, en particulier au regard de la nature des pièces produites puisqu’un bon de commande ou un devis n’a pas la valeur juridique et comptable d’une facture ou d’un contrat.

Le rapport d’activité transmis est succinct et ne répond pas aux exigences de la seconde annexe de l’arrêté du 11 octobre 2006 rappelées plus haut. En outre, d'autres irrégularités ont été constatées par les rapporteurs de la CRC parmi elles, des dépenses non justifiées ou non compensées :
Ou encore, des recettes sous-évaluées. La CRC détaille " En valeur brute, les fonds reçus de sociétés privés sont plus du double (147 000 €) de la valeur déclarée par l’association sur le bilan financier transmis au CTIG (71 046 €). Il conviendra néanmoins, dans la correction du bilan financier, de moduler ces recettes supplémentaires par des dépenses de 31 056 € non inscrites au bilan relatives aux places cédées gratuitement et valorisées dans le tableau précédent. Il sera procédé de même pour les places cédées gratuitement aux stations de radio contre des passages publicitaires, valorisées à 11 080 €. Le détail est présenté en annexe 4. Ainsi, le montant total des contre-valeurs des places cédées gratuitement pour les sponsors privés s’établit à 42 136€ " ( voir tableau ci-dessous)

Une autre irrégularité a été dénoncée par la Chambre Régionale des Comptes , elle concerne le résultat financier du concert très supérieur au bilan présenté par l'association. En effet, la haute juridiction précise que
" L’excédent financier du concert corrigé s’élève à 140 227,34 €.Il est donc supérieur de 95 000 € au résultat présenté au CTIG. Bien que la seconde partie de la subvention du CTIG de 50 000 € n’ait été versée que le 27 mai 2020 sur le compte bancaire de l’association, celui-ci affichait un solde négatif de -38,65 € le 4 avril 2020 puis de 860,45 € le 16 juillet 2020, après le versement de la seconde tranche de la subvention du CTIG (50 000 €) en mai 2020.
Le solde du compte bancaire associatif a atteint 243 684,33 € le 19 décembre 2019. Même
si des factures restaient à régler après le concert comme, par exemple, le cachet du groupe
Kassav' (102 475 € payé le 24 décembre 2019), cette chute rapide des liquidités n’a pas
été justifiée. " ( voir le tableau ci-après)

Autre problème apparent le coût de la prestation de parrainage jugé exorbitant par la CRC qui relate que : Le 3 septembre 2019, la société Kod Digital & Business Consulting (KDBC)créée par une certaine Madame Sharone Accipe Vardarassin et qui n'est autre que la fille d'un certain M.Y, directeur des opérations spéciales de Cap Excellence, chef de projet de la manifestation « Jarry en fête». Cette entreprise a proposé un devis de prestations à l’association, en deux parties :
- la gestion de la communication de l’évènement pour 3 500€,
- la recherche des financements extérieurs et le suivi administratif et commercial de ceux-ci pour « 20 % des sommes réellement encaissées »obtenues en parrainage.
Néanmoins, l'institution a émis plusieurs remarques sur cette question, notamment, le taux de 20 % appliqué au fonds reçus est inhabituellement élevé ; les taux se situent en règle générale entre 3 % et 10 %. Ou encore le calcul de la commission facturée (29 400 €) est erroné, le pourcentage de 20 % ayant été appliqué au montant brut versé par les sponsors (147 000 €) et non au montant net des billets cédés gratuitement auxdits sponsors (31 056 €) qui viennent réduire la valeur nette réellement perçue par l’association ; la facture pour le parrainage doit ainsi être ramenée à 23 188,80 €. Qui plus est, le devis KDBC n° 012 du 14 octobre 2019 de 3 500 € a été réglé par virement bancaire de l’association le 20 décembre 2019 ; la facture KDBC n° 10 du sponsoring de 29 400 € du 3 janvier 2020 a été partiellement réglée, à hauteur de 28 200 €, par virement bancaire, le 3 janvier 2020 ; Mais cette dernier a été radiée du registre du commerce le 24 Octobre 2019. Elle n'était de ce fait plus en mesure d'émettre de factures ni d'exercer une quelconque activité commerciale. Ainsi, l'association Sign'Alizé a payé plus qu'elle ne devait à la société KDBC, avec un trop perçu qui s'élève à 5 011,20€.
Un proche du président de Région dans le collimateur des enquêteurs :
L'affaire fait actuellement grand bruit au sein de la classe politique locale puisqu'un certain M.Y, proche de l'actuel président de Région Ary Chalus, est cité. Mais qui est-il ?
Les enquêteurs de la Chambre Régionales des Comptes nous apprennent que ce monsieur M.Y fût un agent titulaire du cadre d’emploi des attachés territoriaux. Cadre de la ville de Baie-Mahault jusqu’en 2016, il avait la responsabilité de l’organisation, par cette collectivité de la manifestation annuelle « Jarry en fête » créée en 2004. Avec le transfert de certaines compétences de la ville vers la communauté d’agglomération Cap Excellence, il a poursuivi cette mission à compter de 2017 pour l’EPCI dans les fonctions de « directeur des opérations spéciales et manifestations à vocation économique ». L’intéressé est aussi mis à disposition du cabinet du président du conseil régional par Cap Excellence, pour 40 % de son temps. Avec ce titre, de directeur des opérations spéciales et manifestations à vocation économique de Cap Excellence a hébergé dans les locaux administratif de cet EPCI, l’assistante de production embauchée de novembre 2019 à janvier 2020 par l’association Sign’Alizé. Cependant, cette mise à disposition de locaux n’a fait l’objet d’aucune convention ou de formalisme, pourtant obligatoire.
La CRC souligne que : " Au-delà du soutien financier indirect et non déclaré que représente cette mise à disposition, cette initiative personnelle du directeur des opérations spéciales mais présentée par lui comme accordée par CAP Excellence sans document à l’appui, alors que CAP Excellence déclare ne pas l’avoir approuvée, a exposé la communauté d’agglomération à des risques au titre de la sécurité et du droit du travail, et peut expliquer les erreurs relevées supra telles que la production au CTIG de documents internes de Cap Excellence en lieu et place de documents de l’association, comme pièces justificatives du bilan financier du concert. "
Par ailleurs, on sait que des documents ont été produits par ce monsieur M.Y afin de justifier certaines dépenses qui auraient été réglées en partie ou en totalité par ce monsieur.

Face aux enquêteurs, ce monsieur M.Y a expliqué qu’en raison de l’absence de Guadeloupe du président de l’association du 7 au 14 décembre 2019 (croisière « Kassav’Love And Ka’Dance » ), il avait dû, en accord avec M. Pierre-Edouard Decimus, se substituer à lui pour régler certaines prestations et garantir la tenue du concert, le 14 décembre 2019.
Le problème comme l'évoque la CRC, trois opérations sur sept ont été réalisées en dehors de la période d’absence du président de l’association et que deux autres dépenses alléguées par M. Y n’ont pas été retenues en raison d’absence de pièces justificatives probantes (1 368,62 €) ou de règlement réalisé en espèces (400 €) au restaurant. Ce qui constitue déjà une infraction à la législation.
Dans son rapport la Chambre Régionale des Comptes relate que ce monsieur M.Y aurait aussi perçu des sommes de somme globale de 106 368,62 € a été transférée, en six versement, depuis le compte bancaire de l’association Sign’Alizé vers le compte personnel de M. Y entre le 7 octobre 2019 et le 2 juin 2020.

Ces virements sont présentés comme des avances ou des remboursements de frais liés à l’organisation du concert « Kassav’40» du samedi 14 décembre 2019 au stade de Baie-Mahault. Aucun justificatif, facture ou contrat au nom de M. Y ne permet de les justifier. Pour se défendre ce dernier a justifié de son investissement personnel et l'engagement de ses fonds propres pour le bon déroulement du concert.
Détail des séquences des dépenses :

Ce qui est également reproché à l'agent territorial proche du président de Région, est le fait qu'il ait pris des initiatives pour le compte de l'association loin de ses prérogatives de fonctionnaire, surtout qu'il n'occupe aucune fonction au sein de cette association. Pour rappel, la loi interdit aux agents contractuels, aux fonctionnaires de cumuler leurs fonctions avec l’exercice d’une autre activité professionnelle dans le secteur privé. Ce principe a été récemment réaffirmé par la loi n° 2016-148 du 20 avril 2016 relative à la déontologie des fonctionnaires, qui est venue insérer un article 25 septies à la loi statutaire n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.
L’article 25 septies I de la loi statutaire du 13 juillet 1983, dans sa nouvelle rédaction
issue de la loi du 20 avril 2016, dispose, désormais, que « Le fonctionnaire consacre
l’intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées. Il ne peut
exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit […] »
De plus, l’article 25 septies de la loi statutaire du 13 juillet 1983 dispose que « Sans préjudice de l’engagement de poursuites disciplinaires, la violation du présent article donne lieu au reversement des sommes perçues au titre des activités interdites, par voie de retenue sur le traitement ». Une infraction à la législation attestée par le président de Cap Excellence qui aurait indiqué n’avoir jamais autorisé son directeur des opérations spéciales à pouvoir cumuler activité publique et activité privée et avoir confié à son inspection générale des services une enquête interne sur les faits mettant en cause cet agent.
Une enquête judiciaire en vue :
Face à autant d'éléments et aux nombreuses questions sans réponse, la Chambre Régionale des Comptes a saisi le parquet. Une enquête préliminaire est en cours. Elle a été confiée à la brigade financière du Service Régional de Police Judiciaire, qui siège au Morne Vergain, aux Abymes. Des auditions sont actuellement menées.
Rapport de la Chambre Régionale des Comptes : Affaire Sign'Alizé :